La solitude des nombres premiers
Il est ici question d'Alice et de Mattia, au milieu des années 80, chacun de leur côté dans deux récits parallèles, subissant la méchanceté que peuvent avoir les enfants entre eux. Tandis qu'elle subit un grave accident qui va l'handicaper et la démarquer à jamais du reste du monde, Mattia élimine lui une part de lui même... On les retrouve plus tard, à l'adolescence lorsqu'ils se croisent enfin et cette rencontre est une évidence, ils se reconnaissent d'emblée sans jamais se le dire, les mots sont superflus ; ne reste que la présence de l'autre, un peu rassurante mais jamais suffisante. "Les autres furent les premiers à remarquer ce qu'Alice et Mattia ne comprirent qu'au bout de nombreuses années. Ils pénétrèrent dans la pièce main dans la main. Ils ne souriaient pas, leurs regards suivaient des trajectoires différentes, mais on aurait dit que leurs corps coulaient l'un dans l'autre à travers leurs bras et leurs doigts joints." On les retrouve ensuite à l'entrée à l'âge adulte, toujours par alternance, Alice mariée mais toujours en proie à l'impossibilité de communiquer sur un quelconque désir et Mattia incapable d'envisager la vie autrement que de manière mathématique. Côte à côte mais jamais ensemble, pourront-ils faire route commune un jour ? « La solitude des nombres premiers » est un roman que l'on dévore, un de ces romans que l'on ne voudrait pas refermer pour continuer à faire un bout de chemin avec des personnages auxquels on s'est attaché. Grâce à une écriture incisive, sans fioriture, presque clinique on est happé par l'étrangeté des personnages et l'on reste troublé par le voile de mystère qui enveloppe certains destins voués à rester solitaires.